31 mai, 2005

Pour Thom

Au copain de la case, l'affreux Thom, bienheureux d'aimer le jazz vocal, je voudrais dédicacer ces trois titres de Pat Moran, chanteuse méconnue, apparentée par un collectionneur japonais admiratif aux « petits pianistes » - à l'image de Michel Sardaby, Duke Jordan, Elmo Hope… - ce qui revient à dire un “petit maître”. Qu'est-ce qu'un “petit maître” ? Ce n'est rien d'autre qu'un artiste qui distille le bonheur sans compter ni chercher à ce que la terre entière en soit avertie.
Que les passagers de ma Cadillac - encore trop rares ! - n'aillent pas pour autant se froisser de cette dédicace personnelle, s'imaginer qu'ils se sont égarés dans un conciliabule entre l'affreux Thom et moi, ni se fâcher de ce que ces pages ressemblent trop aux siennes. Qu'ils sachent seulement que je lui dois tout, que “La Cadillac” n'existerait pas sans son précieux concours, que de nous deux, le plagiaire, le contrefacteur, c'est moi.
Contrefacteur donc qui n'en est pas moins facteur, postier de bonnes nouvelles, de ces « petits luxes providentiels » que chante Christophe. Comme en témoigneront, je l'espère du fond du cœur, ces trois pépites extraites d'un double CD (difficile à trouver) qui rassemble The Pat Moran Quartet et While at Birdland.

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The Pat Moran Quartet
Gone With The Wind, c'est ici

While at Birdland
Lullaby of The Leaves, juste ici
et I Can't Get Started (instrumental), .

Pour ma part, je rêve de mettre la main sur celui-ci :

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28 mai, 2005

T'as le blues, coco…

Bien au-delà du “oui” ou du “non” au traité constitutionnel, la France semble aujourd'hui divisée entre ceux auxquels ce débat a donné la patate et ceux auxquels il n'aura inspiré qu'un blues acide, venu de la bile, au goût aigre, écœurant. Ceux-là, dont je me sens assez proche dans le fond, je voudrais les aider à passer le week-end en douceur et les encourager à se rincer les oreilles avec CeDell Davis et Junior Kimbrough, princes avachis du Delta, dont le blues a conservé des saveurs de gombo épicé, chaleureuses, dansantes…

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CeDell Davis

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Junior Kimbrough

Pilliers du label Fat Possum, ils sont, avec Robert Burnside, ce qui s'est fait de mieux en matière de blues depuis quarante ans, le reste n'étant, dans le meilleur des cas, qu'anecdotique. On en prendra pour preuve Feel Like Doing Something Wrong de CeDell Davis et Meet Me In The City de Junior Kimbrough .

Le premier est ici, avec Got To Be Moving On
Le second, , avec Nobody But You

Pour des lendemains qui chantent, comme on dit…

05 mai, 2005

Monde cruel

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Bob Dylan, Karen Dalton and Fred Neil at the Cafe Wha Feb. 1961

Avec Miss Nobody, nous avons un litige à propos d'un traditionnel interprété par Karen Dalton, merveilleuse chanteuse, justement comparée à Billie Holiday mais injustement oubliée, prématurément disparue en 1993. À l'écoute des 2:22 mn de Katie Cruel, la Miss a juste le temps de reconnaître des souvenirs de folklore irlandais (puissance du banjo) alors que je me laisse bercer par de douces inflexions de musique yiddish (mélancolie du violon). Il m'arrive même d'imaginer que ce standard pourrait naturellement accompagner certaines séquences du Heaven's Gate de Michael Cimino. Aussi avons-nous décidé d'un commun accord de prendre à témoin la communauté des bloggeurs - non pas pour nous départager, ce qui n'aurait pas plus d'intérêt que cela - mais pour nous apporter peut-être quelques éclaircissements sur les origines de cette complainte, tout à la fois tendre et déchirante.
Si It's So Hard To Tell Who's Going To Love You The Best, l'un des deux disques de Karen Dalton a bien été réédité en CD, il n'en va pas de même pour In My Own Time - d'où est prélevé notre Katie Cruel - lequel n'existe qu'en vinyl et fait malheureusement partie des introuvables.
Quoi qu'il en soit, Marie Laforêt en a donné une adaptation - Katie cruelle - tout à fait dans l'esprit de la variété française des années 70. Quand à Nick Cave, il s'en est judicieusement inspiré pour composer When I First Came To Town, sixième plage de son Henry's Dream. Aucun des deux n'égale néanmoins la version de notre princesse méconnue.
En attendant, commencez par vous délectez avec Katie Cruel. Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, When A Man Loves A Woman, c'est .

04 mai, 2005

Adieu, ma jolie

Commençons, pour inaugurer ma nouvelle Cadillac, par l'ignorance. De Keith & Tex, je ne sais rien, sinon qu'ils ont gravé une poignée de chansons régulièrement reprises dans les compilations Trojan. En existe-t-il d'autres ? Et si oui, où sont-elles passées, les bougresses ? Le net n'a pas l'air au courant et n'est pas plus bavard à ce sujet que le Bass Culture de Lloyd Bradley paru chez Allia.

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Cela vaut-il la peine au fond de remuer ciel et terre pour des chansons ? Oui. Nous sommes quelques-uns à savoir que la seule différence entre l'enfer et le paradis, c'est qu'au paradis, on chante. Une bonne chanson, c'est un film dont a enlevé le superflu, et même l'essentiel. S'il reste quelque chose, c'est une chanson. Et elle nous accompagnera toute la vie.

En voici deux,
avec le train pour point commun. Quand les chansons prennent le train, quand il s'agit d'empêcher celui-ci de quitter le quai, d'en faire descendre celle qu'on meurt de voir s'en aller, l'amour est dans l'air et rythme la mélancolie.

Stop That Train c'est ici, et Leaving That Train, c'est .