Une fois n'est pas coutume, je pourrais composer cet envoi à la manière de Question pour un champion. Top, c'est parti ! Né en 1914, condamné pour homicide, je purge ma peine au pénitencier d'Angola où je chante du blues en m'accompagnant à la guitare… Et blah blah blah, et blah blah blah…
Cela raconte-t-il quoi que ce soit ? Non. N'est-ce pas stupide ? Si. Saurais-je jamais raconter quelque chose ? Ce n'est pas gagné !
Blind Test du 20 septembre
Fognama Kurma de Kasse Mady - National Badema - Syllart
(photo Taylor Lasseigne)
Plouf, plouf… ! En 1958, venu enregistrer des chants de prisonniers, l'ethnomusicologue Harry Oster débarque à la prison d'Angola pour finalement tomber sur le détenu Robert Pete Williams qui, convaincu de meurtre, paie sa dette à la société en poussant la chansonnette dans ses derniers retranchements. Entre ces mêmes murs, au pied de ces mêmes miradors où, 30 ans plus tôt, Alan Lomax, un autre ethnomusicologue, enregistrait Leadbelly pour la première fois, Harry Oster gravera dans la cire les complaintes électrisantes de Robert Pete Williams et l'aidera même à obtenir sa libération conditionnelle. Que faut-il penser de tout cela ? Que le savoir reconstruit ce que détruit le pouvoir ? Que la société américaine - sa brutalité, sa violence - conduit ses artistes noirs au cachot ? Qu'aux États-unis, les prisons, tenues par des blancs, fabriquent de grands artistes noirs ? Que l'art, loin d'être un chemin qui ne mène nulle part, ouvre une voie vers le salut ? Qui sait… ?
Harry Oster & Robert Pete Williams
Leadbelly et Alan Lomax
La réponse, évidente comme un que multiplie un, s'inscrit pourtant en quelques microsillons de lumière et de chagrin. Sertis dans l'âme humaine pour l'éternité, le blues de Robert Pete Williams prend naissance dans un jeu de guitare légèrement décalé, un peu aigrelet, presque désaccordé où se lisent, comme dans une main déjà parcheminée, les mille failles d'une vie, les erreurs de parcours, le repentir, la douleur d'être, les questions tournées vers le ciel…Robert Pete Williams
Ainsi nous est-il donné ici de vivre une autre vie qui ressemble furieusement à la nôtre.- Pardon Denied Again (I'm Blues As A Man Can Be • Arhoolie Records • 1959)
- Come Here Baby (idem)
- Motherless Children Have A Hard Time (idem)
Blind Test du 20 septembre
Fognama Kurma de Kasse Mady - National Badema - Syllart